Développement et application de modèles toxicocinétiques génériques chez le poisson : étude des facteurs de variabilité

Début
mai 2015
Soutenance
décembre 2018
Doctorant
Directeur(s) de thèse Frédéric BOIS
Encadrant(s) Rémy BEAUDOUIN
Résumé

L'évaluation du risque environnemental (ERE) vise à protéger les écosystèmes des effets néfastes causés par l'exposition à certains produits chimiques. L'évaluation de l'exposition a pour objectif de quantifier la « dose externe », ou quantité de produit chimique qui atteint un organisme. Au cours des dernières décennies, de nombreux efforts de recherche ont été faits dans le but d'améliorer la quantification des relations doses-réponse par l'intégration de la « dose interne », directement liée à la toxicité. Cependant, des facteurs tels que les changements physiologiques au cours du développement ou la température ne sont, actuellement, souvent pas pris en compte lors de l'ERE alors qu'ils peuvent avoir une influence sur la dose interne des produits chimiques. Parmi les espèces animales pertinentes en ERE, les poissons sont considérés comme des espèces sentinelles de l'environnement aquatique. Ainsi, des modèles toxicocinétiques (TK) ont été mis au point chez les poissons pour estimer les doses internes à partir d'expositions à des doses externes. Les modèles TK permettent aussi d'extrapoler les données obtenues en laboratoire à des conditions environnementales et entre les espèces. L'objectif de ce travail de thèse a été de développer un modèle TK à base physiologique (PBTK) générique pour quatre poissons téléostéens (truite arc-en-ciel, poisson zèbre, vairon à tête de boule et épinoche à trois épines) et de tester sa capacité à prédire les doses internes selon différents scénarios d'exposition environnementale. Le modèle prend en compte les principales caractéristiques physiologiques des poissons pour modéliser les processus d'absorption, distribution, métabolisme et excrétion au cours de leur croissance et ce quelles que soient la quantité en oxygène et la température de l'eau. Une recherche approfondie de la littérature a été faite afin de collecter les paramètres physiologiques et TK existants sur les quatre espèces de poissons dans le but de paramétrer le modèle PBTK. Des relations allométriques et des modèles de relation quantitative structure à activité (QSAR) ont été utilisés pour prédire les paramètres physiologiques et TK manquants. Tout d'abord, le modèle PBTK a été appliqué à neuf études de cas comprenant des produits chimiques lipophiles et hydrophiles afin de tester la qualité des prédictions du modèle. Par la suite, le modèle a permis d'identifier et de quantifier l'impact des facteurs responsables des variations de la TK des produits chimiques chez les poissons en milieu naturel. Les variabilités interindividuelle et inter-espèces ont été comparées à celles dues à la température d'exposition et à la croissance des poissons. Une hiérarchisation de l'impact de ces sources de variation sur la TK a été réalisée : la variabilité inter-espèces semble être celle qui impacte le plus la TK. Le manque de données expérimentales est la limite majeure pour le développement et l'évaluation du modèle PBTK. Certaines données physiologiques restent à acquérir pour paramétrer les modèles et supprimer une source d'incertitude (e.g., les valeurs des flux sanguins irriguant les organes des petits poissons). De même, des mesures des doses internes en produits chimiques dans différents organes chez le poisson manquent, ce qui limite l'évaluation du modèle PBTK. Pour conclure, les travaux de thèse ont permis de mettre en évidence que des valeurs physiologiques précises et spécifiques à l'espèce doivent être utilisées pour paramétrer les modèles PBTK afin d'utiliser ces outils en ERE et que l'ERE doit être effectuée sur plusieurs espèces de poissons. Globalement, les facteurs d'incertitude classiquement utilisés en évaluation du risque se sont révélés être suffisamment sécuritaires pour les produits chimiques testés. Cependant, la non-prise en compte de l'effet de la température sur la TK d'espèces ectodermes est une lacune pour l'ERE. De nouveaux facteurs d'incertitude incluant la température devraient être utilisés pour ces espèces

Modèle biologique